Nous reproduisons ici l’éditorial du magazine municipal de Montfermeil du mois d’octobre.
Xavier Lemoine, le maire de la ville, y aborde la question de l’accueil des étrangers en s’appuyant sur un document de la Doctrine Sociale de l’Eglise.
« Dans les diverses responsabilités assumées durant ma vie professionnelle, je me suis toujours très fortement appuyé sur des textes que j’appelais « fondamentaux » en ce sens qu’ils récapitulaient, sur des bases anthropologique solides, des problématiques complexes.
Celui qui je vais partager et commenter m’accompagne depuis plus de vingt ans. Il est tiré de l’ouvrage L’Eglise face au racisme. Pour une société plus fraternelle. C’est un document de la Commission pontificale « Justice et Paix » à l’époque présidée par le Cardinal Etchegaray.
Vous trouverez en gras le texte original et en maigre les commentaires que j’y apporte.
« Certes, il appartient aux pouvoirs publics, qui ont la charge du bien commun …/…
Première expression qui indique à quelle hauteur de vue, de réflexions et d’exigences doit se situer l’action des pouvoirs publics où l’on verra que le bien commun peut exiger beaucoup de ceux qui ont alors devoir d’accueillir, voire ne rien devoir du tout à ceux qui demandent à être accueillis.
…/… de déterminer la proportion de réfugiés ou d’immigrés que leur pays peut accueillir, compte tenu de ses possibilités d’emploi et de ses perspectives de développement, mais aussi de l’urgence du besoin des autres peuples. »
C’est donc bien aux pouvoirs publics qui ont toujours la charge du bien commun en dernier ressort, nonobstant des partages de souveraineté ou des mutualisations de décisions ou d’actions, qu’il appartient de déterminer la conduite à tenir sur de tels sujets. Doit-on confier de telles politiques au niveau européen ? Est-ce l’échelon le plus adéquat ?
Une politique d’accueil se fonde sur deux éléments qu’il convient de prendre successivement en compte, éléments dont l’appréciation peut varier dans le temps et ce de manière très rapide. Si la situation sociale, culturelle et économique du pays, susceptible d’accueillir est à prendre premièrement et prioritairement en considération, cette appréciation doit également être pondérée, éclairée par l’urgence qu’il y aurait à accueillir des populations. Aussi, cette urgence doit-elle être hiérarchisée. Ce qui laisse entendre qu’il est difficile de s’en sortir avec des règles issues de Conventions ou de Traités qui leur donnent alors une trop grande rigidité et nous fait osciller entre laxisme dangereux pour la cohésion sociale la paix et l’égoïsme coupable systématique. Nous nous sommes donc privés des moyens de discernement, de réactivité et d’ajustement que de telles politiques requièrent, au regard d’une matière éminemment sensible et évolutive.
Pour ma part, en ma qualité d’ancien officier de Marine, je prenais souvent l’image forte mais vraie, du canot de sauvetage qui est prévu pour X personnes avec très vraisemblablement une marge de tolérance qui permet en effet d’en faire un peu plus, mais avec néanmoins une limite qui, une fois dépassée fait couler pour le coup, tout le monde. Pour notre sujet, l’accueil n’est donc aussi qu’un aspect d’une réponse à un problème qui peut ou doit aussi solliciter des mesures directes d’aides sanitaires, économiques, financières, diplomatiques voire même militaires.
« Et l’État veillera à ce que ne se créent pas des situations de déséquilibre grave, accompagnés de phénomènes sociologiques de rejets, comme cela peut arriver lorsqu’une trop forte concentration de personnes d’une autre culture est perçue comme menaçant directement l’identité et les coutumes de la communauté locale d’accueil. »
Bien évidemment, le multiculturalisme militant de la gauche et lâche de la droite n’a en rien tenu compte de cette sage recommandation et la constitution de très ou trop nombreux ghettos est venue en effet rendre suspect, voire intolérable, toute nouvelle politique d’accueil, en dépit des urgences non moins avérées. La constitution de ses ghettos est bien une offense au bien commun et un véritable obstacle à un accueil serein. Pour autant, si l’urgence est telle que différer l’accueil de nouvelles populations devenait alors gravement coupable, alors des mesures restrictives à l’accueil (liberté d’établissement, restriction de circulation, limitation d’accès aux prestations sociales, durée indéterminée de la durée du séjour à la discrétion du pays d’accueil, impossibilité que puisse être opérants sur le séjour certains événements matrimoniaux pour y demeurer ( naissance, mariage, etc.) peuvent être légitimes.
Ou, comment limiter le plus possible les conséquences dommageables pour la population du pays d’accueil quand l’urgence d’une situation commande que l’on accueille de nouvelles personnes au delà du raisonnable ?
« Dans l’apprentissage de la différence, on ne peut tout exiger d’un coup. Mais il faut considérer les possibilités d’une nouvelles convivance et même d’un enrichissement mutuel. »
C’est bien parce que toutes les précautions auront été en amont prises pour ne pas faire peser à la communauté d’accueil plus qu’elle ne peut raisonnablement supporter, que cette convivance et même cet enrichissement mutuel sont alors possibles, meilleure réponse qui soit au communautarisme dans lequel sombre notre paix civile à ce jour.
« Et une fois qu’une personne étrangère a été admise et se soumet aux règlements de l’ordre public, elle a droit à la protection de la loi pour toute la durée de son insertion sociale. »
Il y a là deux conditions cumulatives. De surcroît, la personne accueillie garde bien la qualité de « personne étrangère » qui, sans rien lui retirer au plan de la dignité, la distingue néanmoins des nationaux. Sa dignité lui confère certes des droits, mais sa qualité d’étranger lui confère aussi des devoirs : ceux d’avoir à être admis (papier/sans papier – admis DA/débouté DA – entrée réulière/irrégulière) et de se soumettre aux règles de l’ordre public ce qui va bien au-delà des seules questions de délinquance, mais englobe y compris le respect de la culture du pays d’accueil (laïcité, égale dignité Homme/Femme, liberté de conscience,…).
Dès lors, ces deux conditions cumulatives étant satisfaites, la personne accueillie peut alors seulement bénéficier de la protection de la loi pour la durée de son insertion, insertion qui passe par le respect et l’apprentissage de la langue, de la culture, d’un métier, … des devoirs certes, mais facilités par les pouvoirs publics.
Votre maire,
Xavier Lemoine »